18.4.07

Dimanche de Fête

On a passé un bon dimanche, McCarthy a gagné le Pulitzer et on a pris le soleil du Morbihan. Que demande le peuple? Savoir où il va..., tiens pour commencer...

9.4.07

White Folks, arnaqueur blanc et "fils de passes"


Après le très troublant et autobiographique Pimp, que j'avais beaucoup aimé, la collection Soul Fiction des Editions de l’Olivier avait publié un deuxième roman d’Iceberg Slim, Trick Baby, que je n'avais toujours pas lu. (Merci Tibo de me le filer...)
Plutot que de vous en faire un résumé moyen, comme j'ai trouvé quelqu'un qui en parle très bien voici les mots d'un autre, Olivier Cathus
La traduction de Pimp était l’occasion de découvrir en français un livre-culte, rien moins que le livre de chevet de nombreux rappeurs américains s’indentifiant au personnage du mac, véritable héros urbain au sein de la communauté noire, symbole du type qui avait compris combien un cul noir pouvait faire cracher leur argent aux michetons blancs.
C’est alors qu’il était en prison, en train d’envisager sa reconversion dans un autre bizness que le proxénétisme, qu’Iceberg Slim rencontra White Folks (pour les amis), alias Trick Baby (pour les autres). Un grand gaillard, sosie d’Errol Flynn. Pourtant il ne faut pas se fier aux apparences, malgré sa peau blanche et ses yeux bleus, White Folks était noir, noir en dedans.
Iceberg Slim le connaissait de réputation, en équipe avec Blue Howard, White Folks ("arnaqueur blanc") était un des plus fameux arnaqueurs noirs de Chicago. Durant leurs quelques jours de cellule en commun, White Folks raconta son histoire à Iceberg Slim qui nous la livre à son tour.
Comme dans Pimp, l’écriture d’Iceberg Slim ne s’embarasse pas de fioritures, c’est l’expérience de la rue mise en mots de la façon la plus brute et directe qui soit. Comme dans Pimp pour le métier de proxénète,à travers un destin particulier situé avec précision dans son contexte socio-historique, nous avons ici le récit d’un apprentissage du métier d’arnaqueur. Vécu de l’intérieur, on découvre les techniques de la combine, ses différents tours… Mais, au-delà de cet aspect qui pourrait passer pour simple folklore, les romans d’Iceberg Slim prennent toute leur intensité par le rendu du contexte, le Chicago et ses cloisonnements raciaux.
Johnny O’Brien est né dans les années 20 d’une mère noire et d’un père blanc. Ce dernier disparut très rapidement du foyer. Ainsi grandit le petit Johnny, seul avec une mère dévorée par l’alcoolisme et s’effeuillant dans un club minable. Un enfant quelque peu livré à lui-même et que les gamins de son entourage, ne pouvant imaginer d’autres types d’union mixte, appelaient Trick Baby, "fils de passe"… La vie était ainsi faite que pour le jeune garçon il était difficile de trouver sa place dans la société américaine ainsi partagée.
Pourtant sa peau blanche devint un avantage dès qu’il se mit en équipe avec Blue Howard qui l’adopta, presque comme un père adoptif, lui appris tous les trucs du métier et lui donna son surnom de White Folks, un oxymore en quelque sorte car un type se faisant appeler "arnaqueur blanc" ne pouvait être que noir. Ensemble, ils allaient pouvoir gruger aussi bien les pigeons noirs que blancs, le bon plan.
Ensemble, ils vivaient bien, dans une certaine opulence mais rien ne va jamais de soi, rien n’est jamais acquis. La vie a ses hauts et ses bas, ses grandeurs et ses décadences. On se retrouve toujours confronté à divers dangers : ne pas empiéter sur les plates-bandes de la Maffia, se méfier des trahisons, des femmes, de l’alcool et des drogues…
Autant dire de suite, que nos deux compère se virent confrontés à un redoutable panaché de ces trois menaces. Pour White Folks, l’amour prit les traits d’une riche et belle femme blanche qu’il appelait la Déesse. Leur union était impossible, elle raciste déclarée, lui poussé à lui révéler le secret de sa négritude. Et "cette garce de Déesse et sa chatte internationale ineffablement brûlante"(p.306) manquèrent de le conduire au fond du trou, au fond de la bouteille, intoxiqué par l’alcool du dépit. La blessure ne se referma jamais complètement mais il compris ensuite qu’ il était plus malin de louer la carosserie d’une gonzesse que de jouer les jolis cœurs"(p.311). Véritables récits de vie, les romans d’Iceberg Slim combinent l’éducation sentimentale du personnage à ses interrogations sur un possible déterminisme social dont il serait autant l’acteur que la victime (une victime qui, en tout cas, ne s’appitoierait surtout pas sur son sort).
Côté sentimental, si l’on constate à quel point l’amour tarifé fait partie intégrante du quotidien, on s’amusera par contre des découvertes de White Folks quand il comprit, en voyant un couple de lesbiennes faire l’amour, l’importance du cunnilingus dans le plaisir féminin : "voilà pourquoi ces lesbiennes n’ont pas besoin d’un zob pour envoyer une fille en l’air. Ces tordues ont une technique diabolique"(p.146). Il se précipitera pour la mettre en pratique avec succès sur la première femme venue, Jackie, une femme mariée qu’il convint moyennant finance de passer au lit avec lui. Résultat concluant : "Je me faisais du souci pour le mari de Jackie : au lit il allait passer pour un nul ! La technique lesbienne avait éveillé la cochonne qui sommeillait en Jackie"(p.149)…
Mais si l’intrigue se retrousse sur ces passages distrayants, le déchirement du personnage semble aussi insoluble que la question raciale aux Etats-Unis. Qu’il reste avec des Noirs et on l’appelera toujours Trick Baby, qu’il aille arnaquer des Blancs, il devra garder pour lui son secret sous peine d’être rejeté tout de go…! Dans Trick Baby, Iceberg Slim nous livre une nouvelle fois un témoignage bouleversant et sans concessions. Iceberg Slim ne juge pas ses personnages, il essaie de nous faire comprendre leur destin souvent tragique. "Je comprends pourquoi le peuple noir doit pour s’en sortir, voler, mais je n’arrive toujours pas à croire que le crime est une solution viable. L’énergie et le talent exigés pour devenir un délinquant de réelle envergure pourraient être utilisés de manière bien plus positive. Si un maquereau parvient à contrôler neuf femmes, il peut tout aussi bien faire autre chose".
Olivier Cathus


Des liens:
Iceberg Slim sur Wikipédia
les livres d'Iceberg Slim

8.4.07

Opéra des Dieux- Emission #14 - VF

Emission #14 - VF de l'Opéra des Dieux
Pour télécharger l'émission, clic droit sur le hamster suicidaire

J'aime pas la Chanson Française

de LUZ (Hoëbeke)



----------------- Anti-BO du livre -----------------

Jezebel d'Edith Piaf
Sur une Nappe de Restaurant de Jacques Dutronc
Tu fais partie du Passé de Zouzou
Connais-tu l'Animal qui inventa le Calcul Intégral d'Evariste
Contact de Brigitte Bardot
Psychose de Messieurs Richard de Bordeaux & Daniel Beretta
Comme à la Radio de Brigitte Fontaine
Le Papyvore des Papyvores
La Mélodie de Christophe
Une Espèce de Lolita... toute verte d'Alain Kan
Bijou Bijou d'Alain Bashung
Pretty Day de Marie Möör
Synchro de Charles De Goal
Je t'écris d'un Pays des Visiteurs du Soir
Le Courage des Oiseaux de Dominique A
Gris Métal de Bertrand Burgalat
Au Matin d'Etienne Charry
Les Plages de Berk de La Position du Tireur Couché
Amoureux Solitaires par Jenny Goes Dirty
Les Matins de Paris de Teki Latex & Lio

7.4.07

Travis est superbe, il est grand.

Il est des concerts que l'on devine être des virages, des étapes marquantes pour l'artiste que l'on aime. Je suis persuadé que ce concert du 5 avril est de ceux là: une grande fête, où Travis Bürki, visiblement heureux, semblait prendre du plaisir à jouer, à l'aise devant un public convaincu, plus en forme et drole que jamais.

Le costume rouge flamboyant à imprimé floral mauve n'aura je pense jamais été porté avec autant de classe... Le sentiment qu'on changeait de division, qu'on franchissait un cap en troquant la minuscule scène du Limonaire pour les flashs stroboscopiques du Zèbre de Belleville. Comme dans la chanson, comme si on s'était interdit trop de choses trop longtemps: Aujourd'hui je suis fatigué j'ai trop attendu je voudrais collectionner les papillons...
Le clin d'oeil aux amis, aux proches et même aux producteurs sur le chemin parcouru... Avec le grand dénument: le retournement de veste.

" Alors quand ils ont débarqués le mercredi en 8, des projets plein leur attachés cases, je leur ai dit, "Messieurs il est grand temps que ma création s'ébruite, mon annonymat me pèse." Ils m'ont demandé de signer au bas de la page me faisant miroiter des liasses et des voyages... et j'ai dit OUI AUX MILLIONS, TOURNEE GENERALE!!!"








3.4.07

Western et Temps de parole



Le débat aura lieu sur Internet ou ne sera pas. Le règlement de compte se fera en zone de non droit. Les porte flingues enchaînent les bains de bouche au Dextril. Ca pique plus que les lèvres en sang badigeonnées à la sauce samouraï d'un kebab mal controlé. Bref, ça va être violent et les mots vont voler aussi bas que le niveau de cette campagne. Pour se mettre dans le mood ‘monde moche- vulgarité- bassesses’, il n'est pas idiot de se fourrer la tête dans un bon western au fond duquel on ne pourra plus décoller les spaghettis.
Cette semaine, on lit Cormac McCarty. Et on aime ça.




Comme la majorité des livres de McCarthy, le pitch est propre et simple : dépouillé au point de foutre la trouille. Un roman résumable en 2 lignes implique obstination, endurance, et esthétique. Cette fois ci encore, on débarque en plein pulp-western.

Voici le début prometteur :
" Il abaisse les jumelles et examine le terrain tout autour. Puis il les relève. On dirait qu'il y a des hommes allongés par terre. Il enfonce ses bottes dans la rocaille et règle les jumelles. Les véhicules sont des camionnettes à quatre roues motrices ou des Bronco avec de gros pneus tout-terrain et des treuils et des rampes de projecteurs sur le toit. Les hommes ont l'air d'être morts. Il abaisse les jumelles. Puis il les relève. Puis il les abaisse et reste assis là où il est. Rien ne bouge. Il reste ainsi un bon moment. " Moss se rapproche, et ne rencontre que des morts et un agonisant demandant de l’eau. Ayant aperçu des traces de sang dans l'argile, il remonte la piste jusqu'à un nouveau macchabée. Il y a une lourde serviette contre le genou de l'homme mort. Quand il se décide enfin à la ramasser, Moss découvre qu'elle est pleine à ras bord de coupures de cent dollars, rangées par paquets entourés de rubans à billets, chaque paquet étant marqué d'un tampon indiquant un montant de dix mille dollars. " Sa vie tout entière est là devant lui. Jour après jour du matin au soir jusqu'à sa mort. Toute sa vie réduite à vingt kilos de papier dans une sacoche. "

Ce que l’extrait ne vous révèle pas, c'est qu’après s’être barré à toute vitesse avec le pognon Moss va revenir sur les lieux sachant, bien sûr, que c’est la pire des conneries… juste pour apporter de l’eau au mourant… Bien sur, il sera attendu. De la réplique qui cogne, encore. Des virages terribles et des scènes bien lourdes… Un champion du livre pop corn ce McCarthy

Mais c’est loin d’être son coup d’essai. Une trilogie terrible avait déjà bien fait du bruit…'De si jolis chevaux', 'Le Grand Passage', et 'Des villes dans la plaine'. Les histoires d'un changement de temps, entre l'Amérique des John Wayne rhumatisants et celle des Raisins de la colère teintés prohibition.



"1949. Parce que les choix de l'Amérique moderne condamnent leurs rêves d'aventure, John Grady Cole et Lacey Rawlins quittent le Texas et chevauchent vers le Mexique. Ils iront vivre ailleurs, au royaume des chevaux, pour célébrer avec une nature intacte des noces éternelles." Dit comme ça, on sent un « Brokeback Mountain » nous tomber dessus… et on a tort forcément, car tout est beaucoup plus violent… quand on déboule dans le Mexique de McCarthy.


'Des villes dans les plaines' (le seul que j'ai lu des trois en fait ;-)) clôt la Trilogie des confins commencée avec De si jolis chevaux et Le Grand passage. Cormac McCarthy remet en scène les deux jeunes cowboys, Billy Parham et John Grady, l'as du rodéo avec winchesters, lassos, chevaux, grands espaces et sierras du Nouveau Mexique. Une amitié fraternelle unit les deux hommes, que neuf ans séparent. Le roman commence en 1952, alors que les deux héros travaillent comme vaqueros dans un ranch de la région. L'exploitation est cernée au nord par Alamogordo et ses terrains militaires qui menacent toujours de s'étendre, et au sud par les montagnes du Mexique. Inéluctablement, le monde des cowboys est grignoté par les transformations de la société. Billy et John, poursuivant les troupeaux égarés, sentent cette disparition graduelle et les changements à venir. Ils rêvent d'un ailleurs, le Mexique. Ils traînent dans les bars et les bordels. Puis John Grady s'éprend d'une jeune prostituée mexicaine et épileptique, Magdalena. (La scène de la rencontre ferait rêver n'importe quel cinéphile). Il décide de la kidnapper et déclenche alors la tragédie.

Je vous parle rapidos du Méridien de sang qui lui est pas mal du tout, même bien plus judicieux à lire en ce moment, si on en regarde l'actualité du droit d'ingérence en Irak et tout le reste... Bref, on ne s'épenche pas politique, mais l'idée c'est qu'on veut le bien de tout le monde et qu'on flingue à tour de bras au nom de la morale... Ce roman se passe juste après la guerre entre le Mexique et les Etats-Unis entre les déserts du Texas et les rives du Pacifique. Le héros est un garçon de quatorze ans, qu'on appelle le Gamin. Il a des trous dans les bottes et les pieds qui puent et ça c’est important pour le coté western. Il a laissé sa famille dans le Tennessee pour rejoindre une bande d'irréguliers qui traquent les Indiens pour le compte du gouverneur de l'état mexicain du Chihuahua, comme la chanson de l’été. Cette bande de soldats pillent, brûlent et tuent. Et c'est assez costaud niveau scènes de viande. Mais quand ils arrivent dans le Colorado, ils se font massacrer par les survivants des Indiens yumas. En gros, tout le monde tue tout le monde, et les règlements de comptes s’enchaînent sans que les protagonistes ne choisissent vraiment d’y prendre part. Le gamin et le chef s’en veulent méchamment. Leur interminable poursuite débute au milieu des dunes de la Vallée de la Mort et se terminera vingt ans plus tard de manière grotesque et tragique dans le bordel d'une petite ville du Texas.
Une de mes phrases préférées, proférée par un vieil ivrogne:
"Y a quatre choses qui peuvent détruire le monde, dit-il: les femmes, le whisky, l'argent et les nègres..."

Revenons au duel de mots de nos cow-boys présidents à nous. Je repense au flow de Ségolène et je rigole. Car pour d'autres, les mots sont des balles qui se collent entre les deux oreilles des non croyants. Délit de grande vitesse pour Cyanure. Il sera flashé près de Lyon à 210 mots minutes. Bernard Pivot s'est fait virer de sa dictée pour moins que ça.