22.6.08

Etre bohème, c'est sentir des pieds

Les beaux jours ont fichus le camp aussi vite qu'ils étaient venus. Ce n'est pas ben grave en soit, en fait. On se dit juste qu'on attendra le tube de l'été jusque septembre prochain, et on patiente en imaginant les pique nique sauvages aux bords du canal à dégoiser de la crise d'automne du PSG avec un brin d'avance. Mais, force est de reconnaître que le quotidien en a pris un petit coup: le cadre a bougé sensiblement. Le TER Picardie s'est vidé des ses écoliers et trimballe maintenant une poignée de poilus vers les tranchées de navets qui les attendent, les gouttes s'évadant sur les vitres grasses. L'air est lourd et la chemise colle.
C'est le moment idéal pour écouter des choses pas trop mal, en lisant des trucs pas trop nuls. Donc on a fouillé dans ses cartons, et on a retrouvé des petites pépites d'authenticité près desquelles on était passé trop vite. Je veux vous parler du disque de Soltero, "You 're no dream". Un mec épatant, une histoire touchante. Des textes vrais et un voix juste éraillée ce qu'il faut pour éviter la pale copie d'un Dylan francophile. Le mec est folk, il écorche autant qu'il s'est fait écorché. Ses chansons valent l'abonnement carte fréquence grand voyageur.
Bercé par le roulis, la joue sur le feutre rèche des sièges vert clope, on respire l'acier des freins et on s'endort le ventre barbouillé. On voit mieux sans le soleil dans les yeux. Et on voit mieux tout seul, aussi. Mais on voit surtout carrément mieux les paupières closes... On oublie le Soltero du Pop'In pour l'imaginer en paysage 16/9ème.



"Un mec tout seul. Il se ballade avec sa guitare en plein Limousin. Il a l'air de se cailler, dans le vent cinglant, malgré son bonnet péruvien et son pull en poils de chèvres. Oui, ça sent les ajoncs trop humides et la mousse trop sèche. Il voudrait jouer un petit quelque chose, mais avec ce vent, autant laisser tomber. Il se contente de s'assoir sur un rocher, se déchausse et se masse les bout des pieds: deux heures de marche au milieu des vaches pour arriver là, au centre du rien, et on s'aperçoit qu'on n'a même pas pris son briquet, et qu'on a lutté 5 min pour se rouler cette cigarette inutile... Soudain, il réalise que l'odeur étrange, ce n'est pas l'automne, ni même la ferme plus bas, mais juste ses pieds. Ce mec est un vrai poète, et il vient de s'en rendre compte: être bohême, c'est sentir de pieds"

Soltero - Out at the Wall



Soltero - Lemon Car




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15.6.08

Back dans les bacs

L'immobilier à Paris n'est plus un débat, une source de questions et de problèmes ou même une préoccupation localo-nationale: c'est devenu l'identité de la ville elle-même... Paris, c'est y vivre, et être à Paris, c'est se claquer le luxe de pouvoir y crécher. Tout le monde ne le peut pas.
Et comme les quartiers changent logiquement en fonction de ses habitants, c'est toute la ville qui se transforme: le bourgeois est la norme et côtoie le super-bourgeois. Petit quartier populaire en voix d'extinction cherche reprenneur pour reprise en douceur, commerces de quartiers, jeunes couples, et retraités intéressés...

Et ce lifting violent et inéluctable que se prend la ville est réparti à l'égal dans toutes les directions et sur tous les quartiers. Tous, quoi que, ... pas complètement. Il existe des ilots qui n'intéressent pas encore les promoteurs et les que les politiques regardent encore du coin de l'œil sans trop oser y foutre le nez. C'est le cas de la rue Myrha.

Ce petit morceaux de bruit, de vie et de bazar est coincé entre Barbes et La Chapelle. On peut encore y voir vibrer un Paris populaire, plein de couleur et qui ne sent pas encore trop Les Inrocks ou Telerama (quoi que, y a le truc des burgers en haut...). Mais bref, cette rue, c'est tout ce que j'aime dans le XVIIIème: le coté pas simple et pas évident, un brin crade et gueulard, la rue qui t'attire autant qu'elle te repousse. Une rue vivante qui n'intéresse pas grand monde, qui galère un maximum, mais qui fonctionne... entre vente de volaille vivante, atelier de couture et deal de médocs. Les rapports y sont plus justes qu'ailleurs, mais pas forcément plus rigolos.

Et qui va disparaitre, bien sur, envahie de bobos, dont je suis avec force un des ambassadeurs...

C'est pas étonnant que Soan & Azel en aient tiré un titre terrible, au rythme enivrant et au texte tranchant... Le résultat est étonnant, le pétillant et l'amertume d'une Ginger Ale à 20° , avec quelque chose d'assez peu définissable, d'oriental et même d'onirique ... La rue Myrha, en quelque sorte...



Vinyl SA- "La rue Myrha"
2 juil. 2008
Abracadabar
28 août 2008
Sortie de la compil Rock en Seine avec Vinyl S.A.
15 sept. 2008
Trabendo