14.9.06

Elle s'appelait "Fait Divers"


Voici une collection qui me laisse songeur. Je ne sais toujours pas quoi en penser. Vous vous souvenez de David Foenkinos ? Bien sûr ! Comme moi vous avez apprécié le « Potentiel érotique de ma femme », -enfin de la sienne en l’occurrence-, par ce qu’il avait de malicieux, d'intelligent, de drôle même. Parce c’est aussi ça un ‘bon’ roman : un petit moment arraché à Julien Courbet, pendant lequel on n’a peut être pas fichu grand-chose et dont on n’est pas ressorti transfiguré, certes, mais qui ne nous fait pas nous sentir sale ou honteux.
Bref, quitte à passer pour un lecteur plus keufna que La Pléaide, j’y ai même vu plus que ça, une jolie vision du quotidien, une envie d’absurde et un sentiment amoureux qui allait plus loin que le potache et le bon jeu de mots. Du vrai talent quoi.
Le roman suivant, cher David, m’a laissé sur ma faim. Je pensais que la pointe de malice décelée dans le précédent ‘opus’ comme on dit dans le poste, allait déboucher l’impertinence assumée, et que le sarcasme, fut il fin et audacieux, allait laisser place à une immense vague d’amour et de courage. (Je suis assez Walt Disney). Et boum, le coup de la panne. J'ai trouvé un copié collé du précédent, en plus tranché, dans le bon comme dans le moins bon. Un masque, un voile. Alors, après cette fade deuxième mi-temps, en bon supporter, j’attendais avec curiosité le retour du championnat. Et là encore, j’ai été pris à contre-pied. Le marché des transferts a été très actif et c’est désormais sous le maillot de GRASSET que vous évoluez. Dans l’équipe de fous de Jérôme Béglé qu’est cette collection ‘Ceci n’est pas un fait divers’, dont le but est de produire des fictions de qualité, façon romans noirs, autours de faits divers connus et reconnus. -Vous avez certainement entendu parlé du roman sur ce BagBoy, le petit Grégory Villemin-. Réel et imaginaire, rôle de l’écrivain face à l’histoire, responsabilité face aux concernés, y a-t-il un journaliste dans l’avion… ça fait beaucoup de questions. Toujours est-il que vous, David, vous attaquez à l’inexplicable affaire Florence Rey /Audry Maupin. -Un thème casse gueule de champion !-. Et j’ai lu avec attention, mon carton rouge à la poche, prêt à punir le moindre tacle au niveau de la gorge.

Et vous m’avez encore une fois bluffé.


LES COEURS AUTONOMES
DE DAVID FOENKINOS
Editeur : Grasset
170 pages/14.9 Euros

Le livre est bon. Il y est dépeint un couple normal, parce qu’humain. Une génération Couplandienne qui ne vit pas dans le désert près de Texlahoma, mais dont la démarche antimatérialiste est identique, quoi que plus proche d’un milieu populaire et donc sur la corde. Et doucement, de l’amour et de la compromission à cet amour, naît l’inévitable désespérance. C’est très bien tourné, sensible mais pas niaiseux, jamais facile ou dans la justification de quoi que ce soit… Seulement, une distance tout de même, entre l'impulsif et l'intello, le quotidien et le fond de la démarche. Très étonnant, mais je l'imaginais très bien Mister Foenkinos au milieu des personnages. Plus que le drame qui a du le toucher, je crois que c'est l'idée de révolte et son impossible application qui le fascine... ou du moins l'interesse. Toujours zetil que le crescendo est maîtrisé à la perfection, si bien que lorsque l’on referme le livre dont on connaissait par avance la fin, on se demande si on arrivera un jour à appréhender la vérité telle quelle fût.
Ben non, Gaston !
Un roman troublant, vraiment.
'Le plan, c'était d'attacher les flics avec leurs propres menottes. Mais ces deux-là n'ont pas de menottes. Les menottes, c'est le coeur du drame. Plus tard, elle dira que si les flics avaient eu des menottes, rien de tout ce qui va suivre ne serait arrivé.'

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