8.9.05

Happy people

En cas de bonheur
de David Foenkinos
Auteur : David Foenkinos
Edition: Flammarion

224 pages/16€




Pour commencer ces revues de la rentrée, un petit roman frais et sans prétention qui a le bon goût d'être fin et intelligent. Une histoire d'amour actuel, d'un couple classiquement moderne, que Foenkinos engonce avec plaisir dans les clichés les pires pour en faire ressortir au mieux l'humanité touchante. Un très joli roman, pétri de potentiel amoureux.

L'auteur:


David Foenkinos à tout juste 31 ans quitte peu à peu le costume d'écrivain à potentiel pour celui d'écrivain accompli. Victime du délit de gueule joviale, le jeune homme a toujours écrit de jolis romans, (tantôt légers, tantôt drôles, tantôt les deux) et a souvent été considéré très injustement d'ailleurs, aussi léger que les histoires que traversent ses personnages. Sous l'idée idiote que l'humour de ses textes ne pouvait cacher qu'un contenu romanesque maigrichon bien que sympathique, il a longtemps gardé cette casquette de romancier 'jeune' pour lecteur en vacances. Et bien tout est faux! Désormais, il faut compter avec lui, et lire sérieusement ses livres non sérieux. D'abord, s'intéresser à sa bibliographie, qui est tout sauf ridicule.

Entre les oreilles [2002](Gallimard) Prix Esprit Bacchus de la Ville de Saumur, Prix de la Fondation Hachette
Inversion de l'idiotie. De l'influence de deux Polonais [2002](Gallimard)
Le potentiel érotique de ma femme [2004](Gallimard)Prix Roger Nimier
En cas de bonheur [2005](Flammarion)

Ensuite, on peut rajouter que ce garçon est aussi touche à tout, ou disons qu'il suit sur d'autres supports sa vision de des choses et des personnages. Également scénariste, il coécrit avec Jacques Doillon un film pour le cinéma et adapte pour le théâtre la pièce 'Messie' de Martin Sherman. Il écrit également le scénario d'une bande dessinée, premier volet d'une trilogie intitulée 'Pourquoi tant d'amour ?'.

On avait déjà beaucoup ri et beaucoup parlé du "Potentiel érotique de ma femme", et ce qui avait été dit alors est à peu de chose près ce qui va être dit ici. Un thème central des relations humaines qui est vissé avec force à des personnages précis et attachants dans leurs contradictions, leurs echecs et leur envie de bonheur.

L'histoire:

L'histoire est assez simple car assez banale ou commune. Claire et Jean-Jacques vivent ensemble depuis huit ans. Activités professionnelles pas véritablement épanouissantes, mais qui permettent somme toute d'intégrer doucement une petite bougeoisie parissienne classique. Ils ont une petite fille, adorable et douce qu'ils martyrisent d'activités extra-scolaires assomantes. Un appartement dans un quartier sans histoire(s), pas mal de gigot le dimanche avec la belle famille et un hamac au fond du jardin. Mais, leur tendresse apparente, qui les fait citer en exemple par leurs amis, cache la véritable érosion de leur amour... Forcément. Ce qui doit arriver, arrive: prise de conscience, accident, séparation, retour sur soi...

Avis:

Sous des aspects trompeurs de roman facile, Foenkinos s'amuse d'abord a peindre clichés et habitudes. On trouvera des remarques très fines, de jolies observations du quotidien, et par un humour subtil, il pique peu à peu toutes ces images pour commencer à s'en jouer. On retrouve avec bonheur quelques clins d'oeil aux romans précédents: les positions complètement érotiques de Sonia la stagiaire, entre la porte du bureau et le couloir, ou l'intervention magistrale de deux détectives privés polonais, consciencieux et cinéphiles.

Un livre plein d'humour et très touchant, que j'aimerais qualifié à humour français [car il temps de laisser le "british" au placard]. (Une pensée à cette petite troupe d'auteurs français qui passent par la dérision (et non la moquerie) pour nous mettre le nez dans la moelle de nos contemporains, évoquons Tania de Montaigne (amie de Foenkinos) et sa"Geneviève et la théorie du 5") . Quant à 'En cas de bonheur', je lui trouve plutôt une pointe d'âme russe, sans doute la trace des Polonais...

Transition formidable, à suivre: "La conquête de la Pologne"

Pour l'heure, extrait et prologue:


« Cela faisait longtemps que Jean-Jacques n’avait pas cherché à paraître sous son meilleur jour. Afin de perfectionner la musculature de ses mollets, il préférait depuis peu monter chez lui en utilisant les escaliers. L’ascenseur lui semblait être réservé aux hommes dont les vies sont molles, aux hommes qui ne cherchent plus à séduire. Il rentrait trois minutes avant vingt heures et souriait mécaniquement à Claire. Ce sourire évacué comme on chasse une mouche, il allumait la télévision. Moins sa vie conjugale l’intéressait, plus il se lamentait sur le sort des populations en guerre. D’une manière illusoire et occidentale, il trouvait dans le drame kurde quelque écho à son effritement. »


Prologue en pdf

Aucun commentaire: